L'ordre vient d'en haut - 1

 


L’ordre vient d’en haut !

 

Il y avait de quoi resté pétrifié devant cette réponse glaciale. Son cœur, depuis longtemps devenu une pierre tombale, ne s’émouvait pas outre mesure. Mais dans son esprit, un disque rayé répétait en boucle : L’ordre vient d’en haut ! L’ordre vient d’en haut ! L’ordre vient d’en haut ! …

Cette formule est une réponse paramétrée. Une disquette standard mais implacable que servent souvent des intermédiaires aux regards fuyants. Pour le moment notre homme reste immobile, comme une statue à la Jésus.

L'air était lourd et suffocant. Son casque lourd pesait une tonne sur son crâne aux cheveux grisonnants. Il faisait chaud comme dans les entrailles d’une vierge et son sang battait la chamade dans ses tempes comme des tamtams de guerre. Des filets de sueur glacée lézardaient son front plissé. Ses mâchoires étaient verrouillées, comme un piège qui serre un fauve.

 

L’ordre vient d’en haut !

En d’autres termes, la mission du jour est annulée. Des carotides tranchées, des intestins éparpillés, des crânes éclatés, quelques frayeurs et des dizaines de kilomètres dans les jambes, trois jours sans sommeil et au moment de cracher le venin, il faut se satisfaire d’un coït interrompu. Pour un étalon de compétition comme lui, ce n’était pas un exercice des plus aisés.

Machinalement il fit le tour des lieux, sans détourner son regard des lunettes noires du colonel. La pièce était austère. Des murs de briques sans finition, une table et une chaise. C’est tout. Comme plafond, un ciel de tôles grises. Un décor spartiate pour ordonner aux uns et obéir aux autres. Une vulgaire cellule pour des bagnards engagés volontaires.

C’était pourtant le meilleur spot du périmètre. Autour, que des tentes et des baraquements en bois. Des tranchées, des barbelés et des sacs de sable empilés. On n’aime pas trop venir sur la base 403. Peu importe où sur le globe, on fait difficilement plus rustique, austère et dépouillé. Les humanitudes s’y croisent sans s’attarder. Des blessés y agonisent. On y bouffe du plomb et de la poudre.

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